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Un message conserve son caractère publicitaire, même diffusé sur un profil Facebook

Jon Senior (cc)

Florian Martin-Bariteau est candidat au LL.D. à l'Université de Montréal et doctorant contractuel à l'Université d'Aix-Marseille.
22 juillet 2013
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Dans un arrêt du 3 juillet 2013, la 1ère chambre civile de la Cour de cassation a estimé que le fait de partager une publicité sur Facebook n’en changeait pas le caractère publicitaire. Les messages diffusés par les internautes grâce aux applications fournies par les marques d’alcool restent dès lors soumis aux dispositions des articles L. 3323-2 et suivants du Code de la santé publique. Cette position s’applique également lorsque le message est diffusé sur un profil Facebook – quand bien même celui-ci serait restreint et constituerait un espace privé au sens de la jurisprudence.

La société Ricard a lancé en juin 2011 une campagne de publicité « Un Ricard, des rencontres », avec notamment une application pour téléphone mobile. Cette dernière permettait la diffusion par les utilisateurs de messages promotionnels au sujet de la boisson anisée. L’Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie a saisi les tribunaux estimant que les messages diffusés contrevenaient aux dispositions du Code de la santé publique relatives à la publicité sur les boissons alcoolisées (art. L.3323-2 et suiv.).

Les juges de première instance, confirmés en appel, lui ont donné raison, estimant, d’une part, que le message diffusé était bien soumis aux dispositions visées – ce que la société de spiritueux contestait -, et, d’autre part, que le message était contraire aux règles fixées par la loi. La Cour de cassation confirme ici l’analyse des juges du fond, notamment quant à la qualification du message diffusé par l’internaute.

Il faut noter que ce n’est pas l’internaute qui est poursuivi mais la personne à l’origine de la création et de la diffusion du contenu en cause. Or, justement, les images de promotion de la boisson “Ricard” et les statuts Facebook ont été créés par une application mise à disposition par le producteur à des fins de marketing social. L’internaute ne fait ainsi que relayer une publicité mise à disposition par la société de spiritueux. Les contenus incriminés ont un caractère publicitaire évident, partant, la Cour de cassation estime, à juste titre, que la législation en matière de réglementation de publicité des produits doit s’appliquer.

Cette position de la Haute Juridiction s’inscrit dans la logique de sa jurisprudence. On rappellera que, dans un arrêt du 3 novembre 2004, la Chambre criminelle de la Cour de cassation avait déjà indiqué qu’à défaut de définition de ce qui constituait une publicité illicite au sens du Code de la santé publique, il s’agissait de “tout acte en faveur d’un organisme, d’un service, d’une activité, d’un produit ou d’un article ayant pour effet, quelle qu’en soit la finalité, de rappeler une boisson alcoolique sans satisfaire aux exigences de l’article L. 3323-4”.

Tout en s’adaptant aux nouvelles pratiques marketing qui impliquent de plus en plus le recours aux réseaux sociaux et à la création d’une conversation et d’échanges avec le client, l’industrie du spiritueux doit donc rester très vigilante et vérifier que tout message émis est conforme aux dispositions du Code de la santé publique.

L’interprétation des faits opérée par les juges du fond, et de la Cour de cassation, n’est pas exempte de tout reproche en ce qu’elle qualifie d’illicite les messages contenus dans les publicités; mais il s’agit là d’une autre question.

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