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Uber est-il allé trop loin avec ses majorations du 31 décembre?

Jason Tester Guerrilla Futures

Étudiant dans le cadre du cours DRT6929-O.
3 février 2016
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UberX est arrivé au Québec depuis maintenant plus d’un an. Certains utilisateurs ont, depuis ce temps, pris l’habitude d’utiliser ces transports plutôt que d’utiliser ceux des compagnies de taxi. La raison qui amène les consommateurs à utiliser Uber est généralement due à la simplicité du service qui se traduit par un service d’application simple et de paiement prélevé automatiquement.

Dans la nuit du 31 décembre 2015 au 1er janvier 2016, certains utilisateurs de UberX ont découvert une autre facette de l’application qui s’avère être la majoration des prix en fonction de l’offre et de la demande. On parle ici d’une tarification dite de « prix dynamique ». Plusieurs utilisateurs des services UberX ont eu une surprise lorsque leur transport leur a couté beaucoup plus cher de que ce qu’ils s’attendaient à payer. Certains clients se sont vus payer jusqu’à 9 fois plus cher que le tarif qu’ils auraient payé normalement.

La raison de cette majoration est de permettre à Uber de répondre à la demande de tous ses clients, et ce, même les journées les plus occupées de l’année. En utilisant des algorithmes, ils analysent des masses de données générées par notre présence en ligne, ce qui leur permet de fixer les tarifs en temps réel. Uber se permet de majorer ses prix lorsque la demande est plus forte que l’offre afin d’inciter les chauffeurs à travailler.

La clinique Juripop a décidé, sous le nom de certains consommateurs, d’amener Uber devant les tribunaux afin de faire rembourser les clients qu’il aurait, selon eux, floué le 31 décembre 2015. Juripop essaie de prouver que la compagnie de covoiturage a profité de la forte demande du 31 décembre au soir afin de gonfler le tarif de ses services. Ils reprochent aussi à la compagnie de se cacher derrière un algorithme qui fournit des factures aussi importantes et démesurées afin de mettre plus d’argent dans leurs poches. Selon Me Marc-Antoine Cloutier, président de Juripop;

« Même s’il y a consentement, on peut forcer les compagnies à venir réduire les montants qui sont exigés pour que la proportion entre le payement et le service reçu soit raisonnable et ait du sens en vertu du Code civil et de la loi sur la protection du consommateur »

La clinique Juripop affirme qu’il y aurait eu un abus inacceptable de la part de Uber envers ses consommateurs. En vertu du Code civil et de la Loi sur la protection des consommateurs, lorsqu’il y a une disproportion aussi marquée entre le service que l’on reçoit et le prix que l’on paye, il y a présomption d’abus du consommateur. Selon l’article 1437 du Code civil du Québec, un consommateur ne peut consentir à un contrat qui est « abusif » :

art 1437 « La clause abusive d’un contrat de consommation ou d’adhésion est nulle ou l’obligation qui en découle, réductible. 

 Est abusive toute clause qui désavantage le consommateur ou l’adhérent d’une manière excessive et déraisonnable, allant ainsi à l’encontre de ce qu’exige la bonne foi; est abusive, notamment, la clause si éloignée des obligations essentielles qui découlent des règles gouvernant habituellement le contrat qu’elle dénature celui-ci. »

La clinique Juripop pourrait aussi faire valoir l’article 8 de la Loi sur la Protection du consommateur qui vient dire que le consommateur peut demander la nullité ou une réduction des obligations qui en découlent, lorsqu’il y a une différence assez importante entre les prestations respectives qui sont considérées comme une exploitation du consommateur.

art 8 « Le consommateur peut demander la nullité du contrat ou la réduction des obligations qui en découlent lorsque la disproportion entre les prestations respectives des parties est tellement considérable qu’elle équivaut à de l’exploitation du consommateur, ou que l’obligation du consommateur est excessive, abusive ou exorbitante. »

La clinique juridique vient aussi contrer l’argument de « consentement de la part de l’utilisateur » qui est mis de l’avant puisqu’en général, les gens prennent Uber afin d’épargner de l’argent sur une course et non le contraire.

Pour se défendre, le porte-parole d’Uber, Jean-Christophe de le Rue, a expliqué que les utilisateurs doivent accepter plus d’une fois le tarif avant de compléter leur commande;

« Il est important de rappeler que les utilisateurs sont clairement mis au courant si le prix dynamique est en fonction, qu’ils doivent accepter la surcharge et même entrer manuellement le multiple dans l’application », a expliqué Jean-Christophe de le Rue, porte-parole d’Uber. »

Ses arguments sont aussi appuyés par le bureau de la concurrence du Canada qui vient dire que la majoration est une mesure économiquement efficiente puisqu’elle fait en sorte d’amener plus de chauffeurs à travailler en période de fortes demandes. De plus, Uber tient à mentionner qu’en moyenne, la majoration du 31 décembre au soir fut de 2,2 fois le tarif habituel, ce qui a permis au Montréalais d’attendre en moyenne 4,3 minutes pour leur transport. Certes, suite à certaines crises, Uber a décidé d’adopter une politique afin de plafonner les tarifs en période de fortes demandes.

Pour en revenir aux faits, Uber a peut-être été trop loin avec ses majorations du 31 décembre, mais les clients qui ont commandé via l’application Uber, ce soir-là, ont tout de même vu et accepté les prix. On peut comparer cette situation à une personne qui se présente dans restaurant et commande une bouteille de vin à 200 $ et une assiette à 70 $ et que le lendemain, cette même personne se plaiderait en voyant son état de compte de carte de crédit. On peut donc se poser la question à savoir si le blâme revient au client qui n’a pas été vigilant ou plutôt à la compagnie qui a profité, d’une certaine façon, d’une situation pour se faire plus d’argent.

 

 

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