Le 4 février 2016, la National Highway Traffic Safety Administration — l’agence fédérale américaine en charge de la sécurité routière — confirma dans une lettre adressée à Google qu’elle considèrerait l’intelligence artificielle de la Google Car comme le « conducteur » responsable du véhicule. Cette affirmation sous le coup de la loi fédérale américaine pourrait accélérer le développement des voitures autonomes aux États-Unis et amorce une belle avancée dans l’acceptation de ce nouveau type de véhicule.
Les États-Unis donnent le feu vert à la Google Car.
Il est depuis longtemps question de savoir comment la voiture autonome pourrait être encadrée juridiquement pour permettre son développement et sa démocratisation dans les années futures. Aujourd’hui, la loi, qu’elle soit américaine ou canadienne, ne prend pas en considération ce nouveau type de véhicule et ce malgré les récents progrès technologiques accomplis par les constructeurs et les firmes technologiques comme Google, Apple ou Tesla. C’est la raison pour laquelle Google a demandé à la NHTSA, des clarifications pour savoir comment elle comptait interpréter la loi vis-à-vis de la voiture autonome dans le futur.
Voici un extrait de la réponse de la NHTSA rendue le 4 février 2016 :
« As a foundational starting point for the interpretations below, NHTSA will interpret driver in the context of Google’s described motor vehicle design as referring to the SDS, and not to any of the vehicle occupants. We agree with Google its SDV will not have a driver in the traditional sense that vehicles have had drivers during the last more than one hundred years … If no human occupant of the vehicle can actually drive the vehicle, it is more reasonable to identify the driver as whatever (as opposed to whoever) is doing the driving. In this instance, an item of motor vehicle equipment, the SDS, is actually driving the vehicle. »
La NHTSA s’accorde ici avec Google pour dire que l’algorithme d’une voiture autonome pourrait légalement être reconnu comme « conducteur » ; les humains siégeant à bord ne seraient alors considérés que comme de simples passagers.
Ainsi, et en suivant le raisonnement de l’agence fédérale américaine, la responsabilité juridique en cas d’accident incomberait logiquement au constructeur de l’algorithme responsable de « conduire la voiture » et non au passager du véhicule, forcé à la passivité.
L’autorité fédérale américaine indique dans sa lettre qu’il faudrait revoir la législation sur de nombreux points, qui n’est aujourd’hui pass compatible avec la réalité des voitures autonomes. Certaines règles stipulent, par exemple, qu’une voiture doit avoir des contrôles pour les pieds et les mains.
Le Canada, prêt à se lancer dans la course ?
L’Ontario est récemment devenu la première juridiction au Canada à permettre l’essai de tels véhicules sur ses routes. Ce projet a commencé au début de janvier et devrait s’échelonner sur 10 ans. L’Ontario a même annoncé un investissement supplémentaire de 500 000 $ dans son programme provincial de recherche sur les véhicules connectés et autonomes, venant s’ajouter aux 2,45 millions de dollars déjà alloué. De plus, selon le ministère des Transports ontarien, une centaine d’entreprises et d’établissements œuvreraient actuellement dans le secteur des véhicules connectés et autonomes dans la province.
Il faut dire que les bénéfices attendus par les voitures autonomes promettent d’être conséquents, qu’il s’agisse du temps économisé par les « ex-conducteurs » (environ 50 minutes par jour) ou de la baisse drastique (jusqu’à 90 %) du nombre d’accidents graves ou mortels sur les routes. Selon une étude de McKinsey, cette diminution des accidents permettrait d’économiser à terme jusqu’à 190 milliards de dollars par an rien qu’aux États-Unis.
Le bouleversement dans la loi ?
Le ministre fédéral des Transports Marc Garneau a souhaité qu’un comité parlementaire évalue au cours d’une étude les avantages et les inconvénients d’avoir des véhicules automatisés sur les routes du pays et les conséquences réglementaires, politiques et techniques pour que le Canada puisse envisager une transition vers la voiture autonome.
Une chose est certaine, il faudra bien revoir, comme pour les États-Unis, les lois et la régulation autour de du Code de la sécurité routière pour intégrer pleinement les voitures sans pilote dans le paysage routier canadien comme le confesse Marc Garneau :
« There are rules and regulations that will have to be put in place that don’t exist at the moment. »
Qui roulera verra…
Les États-Unis semblent définitivement ouvrir la voie de la régulation pour la voiture autonome même si le travail juridique à faire dans ce domaine reste conséquent comme l’estime Karl Brauer, un analyste de l’industrie automobile chez Kelley Blue Book :
« Le labyrinthe complexe des questions légales concernant les véhicules autonomes est un immense obstacle à leur démocratisation, tout comme les défis technologiques qu’il reste à accomplir ». Toutefois, il pense que « si la NHTSA est prête à nommer une intelligence artificielle comme une alternative viable aux véhicules contrôlés par un conducteur humain, cela pourrait simplifier énormément le processus de mise en place de voitures autonomes sur les routes ».
Le gouvernement américain promet d’ailleurs d’investir 4 milliards de dollars sur 10 ans, pour assurer le développement de ces voitures et leur acceptation légale. Le mois dernier, le secrétaire du transport, Anthony Foxx, supervisant la NHTSA annonçait que son département développerait un premier cadre juridique pour cet été. Il sera intéressant de voir les résultats.