droitdu.net

Un site utilisant Plateforme OpenUM.ca

L’affichage d’une marque sur la page d’un site internet répond au critère d’ « usage »

Images Money (cc)

23 janvier 2013
Commentaires
Permalien

www.gautrais.com

L’affichage d’une marque sur la page d’un site internet répond au critère d’ « usage » au sens de la Loi sur les marques de commerce. C’est en substance ce qu’on peut retenir du récent jugement HomeAway.com, Inc c. Hrdlicka rendu par la Cour fédérale du Canada, en date du 12 décembre 2012. Dans cette cause, HomeAway.com qui opère la marque Vacation Rentals by Owner (aussi connu sous l’acronyme VRBO), publiant et référençant des services de location d’appartements et résidences entre particuliers pour les vacances, cherchait à obtenir la radiation de la marque de commerce VRBO (proposant des services similaires), invoquant la confusion et l’utilisation antérieure de la marque.

À la lecture combinée des articles 12. (1) et 6. (2) de la Loi sur les marques de commerce, une marque de commerce est réputée enregistrable sauf si elle crée la confusion avec une autre marque déposée. Il y aura confusion lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne.

En application de ces principes, la marque exploitée par HomeAway.com étant enregistrée de longue date et bien connue, alors que le répondant Hrdlicka n’avait fait une demande d’enregistrement de sa marque VRBO qu’en Septembre 2009, HomeAway.com en a demandé la radiation. On comprendra de ce qui précède que c’est la notion même d’ « usage » de la marque qui va être au cœur du débat.

La question soulevée était en effet celle de savoir si l’affichage d’une marque de commerce (en l’espèce VRBO) sur un site web consultable au Canada, bien qu’émanant des États-Unis, pouvait être considéré comme un « usage » de cette marque au Canada.

Afin de répondre à cette question, le Juge Roger T. Hughes a en partie basé son raisonnement sur une interprétation de l’article 4. (2) de la Loi sur les marques de commerce, qui prévoit ce qui suit :

« Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l’exécution ou l’annonce de ces services ».

Le juge s’est exprimé en les termes suivants :

« [18] […] computer accessible information is “both here and there”.

[20] […] legislation must be interpreted in a manner consistent with modern day realities and that computer information which is stored in one country can be said to exist in another ; in this case, Canada.

[22] I find, therefore, that a trade-mark which appears on a computer screen website in Canada, regardless where the information may have originated from or be stored, constitutes for Trade-Marks Act purposes, use and advertising in Canada. »

En résumé, bien que le site web soit basé à l’étranger, tout comme les informations qui y sont stockées, le simple fait que le contenu de ce site soit accessible au Canada, permet d’en conclure à l’usage au Canada de la marque à laquelle sont rattachés les services proposés sur la page web.

En appliquant ce concept d’ubiquité de l’internet, le Juge Roger T. Hughes énonce un principe à la portée très vaste duquel peut s’inférer que la simple apparence de la marque à l’écran lors de la consultation du site web suffit, que les services liés à la marque en question soient ou non concrètement et physiquement accessibles et exécutés au Canada. Les commentateurs de cette décision qui n’ont pas manqué d’exprimer leurs inquiétudes relativement à ce principe de présence virtuelle, ou d’apparence trompeuse de disponibilité effective et immédiate du service. Il convient de préconiser une approche restrictive, applicable uniquement aux faits particuliers de l’espèce. En effet, conférer à ce concept une application générale irait à l’encontre même de l’esprit de la Loi sur les marques de commerce, conditionnant l’obtention et le maintien des droits sur une marque à son utilisation sur le sol Canadien, que ce soit par la vente, la location de biens ou encore la prestation de services.

En effet, on devine aisément les implications et effets indésirables d’une généralisation de ce principe, dans la cadre de litiges impliquant des services offerts par le biais de sites internet.

Par exemple on peut imaginer des pratiques consistant à enregistrer une marque hors Canada, tout en l’affichant sur un site accessible au Canada, pour ensuite entamer des procédures d’opposition pour cause de confusion et d’utilisation antérieure dès lors qu’une marque similaire souhaite procéder à son enregistrement au Canada.

De la même manière mais à l’inverse, on peut imaginer une société n’ayant jamais eu l’intention d’offrir ses services sur le marche Canadien, faire l’objet malgré elle de procédure de violation du seul fait que son site web est accessible au Canada.

Souhaitons que la jurisprudence à venir puisse circonscrire la portée de cette décision en délimitant les contours du concept utilisé par le juge Roger T. Hughes.

Commentaires

Laisser un commentaire

Sur le même sujet

Derniers tweets